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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

De Azarta (ou De Asarta, ou d’Asarta), Emanuele (ou Emmanuel)
Article mis en ligne le 5 novembre 2011
dernière modification le 2 août 2017

par Desmars, Bernard

Fondateur de l’Ecole sociétaire italienne, en 1876-1877.

Membre de la noblesse italienne (il est parfois qualifié de chevalier, ou de comte), Emmanuel De Azarta vit en France pendent plusieurs années sous le Second Empire. Il collabore à la Revue moderne, un périodique fondé par quelques fouriéristes qui paraît en 1857 et 1858 et dans lequel il publie un récit de voyage en Sibérie. Il est également actionnaire de la colonie de Réunion (Texas) ; il participe à plusieurs assemblées générales et entre au conseil de surveillance en 1859 [1].

Propager le fouriérisme en Italie

Dans la seconde moitié des années 1870, il est en Italie, où il s’efforce de diffuser les idées fouriéristes. Auteur d’un ouvrage exposant en italien la théorie phalanstérienne, Cenni sul sistema di Associazione universale di Carlo Fourier, il tente de constituer vers 1876 une Ecole sociétaire italienne qui « se voue à la propagation et à la réalisation du système de Fourier » [2]. La publication d’une brochure accompagne la formation du mouvement et en présente les objectifs.
Dans une lettre adressée à ses condisciples parisiens, en février 1877, il décrit la situation des idées sociétaires en Italie, « une terre presque vierge » pour le fouriérisme : « je connais deux personnes qui étaient phalanstériennes avant notre mouvement actuel, sur 26 millions d’habitants, ce n’est pas beaucoup, et puis il y a quelques individus qui connaissent Fourier d’après le portrait qu’en ont fait les économistes ». Mais avec la création de l’Ecole, écrit-il, « le sol est entamé, et j’espère bien que nous aurons les forces de le défricher et même de l’ensemencer. Au reste, l’Italie a peut-être aussi besoin de notre coopération que nous de la sienne. La situation économique et industrielle et morale est telle que sans un remède prompt et vigoureux, elle entrera, de même que les autres nations, en désorganisation et en décomposition ». Par exemple, face au développement du brigandage en Sicile, « il n’y a que les moyens offerts par notre doctrine qui puissent en venir à bout. Ce brigandage est à mon avis providentiel » [3].
Asarta veut « constituer un groupe solide et puissant de propagande » à Gênes ; il dispose d’un organe, La Pace Sociale. Mais cet hebdomadaire ayant une diffusion limitée, il s’appuie également sur un quotidien déjà existant, La Voce Libera, « laquelle ayant déjà une certaine clientèle nous offre un public tout préparé qui lira nos articles », tandis que les fouriéristes y feront l’apprentissage du journalisme.

En relation avec l’Ecole sociétaire française

Dans ces années 1870 et au début des années 1880, il est en relation avec les fouriéristes français : il écrit aux phalanstériens marseillais [4] ; il apporte à plusieurs reprises sa contribution financière à la survie de la librairie des sciences sociales de Paris, dont l’existence est menacée par la faiblesse de ses activités et l’augmentation de ses déficits [5] ; il incite le Centre parisien à l’action : il souhaite que soit créé un véritable journal de propagande ; et surtout, il demande que soit tentée une application des principes sociétaires : « les temps sont on ne peut plus favorables ; offrir aux bourgeois effarés par les prédications des socialistes révolutionnaires une théorie appuyée d’exemples pratiques, comme le Familistère ou l’Association ouvrière de Leclaire, qui permet d’enrichir toutes les classes sans en spolier aucune, c’est avoir quelques chances sur 100 que la bourgeoisie serait avec nous et que par suite l’essai serait tenté » ; mais pour cela, « il faudrait que le Centre, puisque Centre il y a, se remuât un peu » [6]. L’année suivante, en 1882, il revient à la charge :
« Pourriez vous m’aider, mon cher M. Tallon [gérant de la Librairie des sciences sociales], à résoudre cette question qui m’a été posée par des personnes auxquelles j’ai parlé de nos idées. Comment se fait-il qu’en France, où la théorie de Fourier a eu de nombreux adeptes, où le socialisme est à l’ordre du jour, où l’on est en république démocratique, c’est-à-dire dans un gouvernement où toutes les tendances des masses vers le bien-être sont prises en considération, où plusieurs représentants de nos idées sont à la Chambre, l’on n’ait encore formulé aucun projet sinon pour la réalisation complète de nos idées, au moins pour une réalisation partielle qui eut avancé la question ? Pour mon compte, je ne sais que leur répondre à ce sujet » [7].
Tallon rétorque à son condisciple qu’il n’a qu’à prendre lui-même l’initiative et se faire « le pivot de cette réalisation » [8]. Mais en octobre, De Azarta écrit que, malgré la fortune que semble lui attribuer Tallon, il n’a pas les moyens d’agir seul ; il demande qu’on lui indique qui, parmi les condisciples, pourrait s’associer à ses efforts [9].
Mais le Centre parisien est lui-même à la veille de disparaître. Quant à l’Ecole sociétaire italienne, la documentation fouriériste ne contient aucune information sur sa situation et ses activités pendant une quinzaine d’année. Toutefois, en juillet 1897, un organe fouriériste parisien, Le Sociétaire, signale qu’à Gênes, des disciples italiens (Dianoux, Giudice et quelques autres) se sont réunis au « Palazzo De Asarta » le 7 avril précédent, pour commémorer la naissance de Fourier ; à cette occasion, il porte un toast à l’Ecole sociétaire française [10].