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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Ammel, Jean-Frédéric-Daniel
Article mis en ligne le 16 janvier 2012
dernière modification le 18 octobre 2013

par Desmars, Bernard

Né vers 1788, à Strasbourg (Bas-Rhin), décédé le 17 juin 1862, à Schiltigheim (Bas-Rhin), négociant puis commis-négociant. Abonné à La Phalange.

Fils d’un cafetier, Ammel est négociant dans les années 1830, associé avec un nommé Oppermann dans la gestion d’une maison fondée en 1812 [1]. En 1836, l’animateur du groupe fouriériste strasbourgeois, Carnari, le présente ainsi : « C’est un négociant distingué qui, sans avoir approfondi notre théorie, en est enthousiaste parce qu’il connaît notre but et les moyens proposés qu’il approuve complètement. Du reste, c’est un homme de cœur qui, pour faire le bien, saisit toutes les occasions » [2]. Ammel s’abonne alors à La Phalange.

Mais la maison Ammel-Oppermann fait faillite en 1838 ou 1839 [3]. Vers la même époque, et sans doute en raison de ce revers de fortune, Ammel quitte Strasbourg et s’installe avec sa famille dans la commune voisine de Schiltigheim. D’après les recensements des années 1840 et 1850, il est désormais commis-négociant, profession également mentionnée lors de son décès en 1862. Dans sa correspondance de 1843, il s’épanche longuement sur ses difficultés financières et sur sa situation qui lui impose de longues journées de travail, de 7 heures du matin à 7, voire 8 heures du soir, afin de nourrir sa famille de cinq enfants. Cinq enfants qu’il enverrait bien dans une phalange d’essai, « mais vaincrait-on le préjugé de leur bonne mère ? » Ammel parle aussi de son cousin parisien, Charles Müller, qui demeure rue de Tournon, tout près du siège de l’Ecole ; ne pourrait-on aller le voir, pour le convaincre d’adhérer au mouvement phalanstérien ? Et ne pourrait-on, dans le feuilleton de La Phalange, sous la rubrique Beaux-arts, faire un peu de publicité pour ce cousin, « un des graveurs de taille les plus distingués, artiste et enthousiaste philosophe chrétien » ?

Malgré sa situation matérielle, Ammel apporte sa contribution financière à l’Ecole sociétaire. Il s’efforce également de propager les idées fouriéristes et de faire circuler les publications phalanstériennes à Schiltigheim ou à Strasbourg, ce qu’il relate avec généralement beaucoup d’emphase : en 1843, il affirme n’avoir pas négligé sa « bien faible coopération de propagande pour que vos généreux efforts pour la transformation du monde selon Charles Fourier (seul moyen de salut pour la pauvre humanité qui a besoin de pain pour vivre - avant tout) soient couronnés de succès » [4]. Il est très favorable à la création d’un quotidien, qu’il appellerait volontiers La Fraternité universelle, plutôt que La Démocratie pacifique. Il envoie des listes de personnes à qui l’on devrait adresser la nouvelle publication, et que l’on pourrait ainsi gagner à « notre noble cause de l’unité et de la fraternité universelles ». Il fait référence à plusieurs reprises à la foi chrétienne (il est protestant, d’après le recensement de 1846), quand il exprime ses convictions phalanstériennes.

D’après ses lettres, son engagement fouriériste lui a valu des difficultés dans son milieu social et amical : « dans mon enthousiasme (légitime) pour la cause phalanstérienne, j’ai foulé naguère aux pieds des relations de personnes qui pourraient et m’auraient peut-être aidé à reconstituer ma fortune (évanouie et bien au-delà, hélas !!!) et qui m’en veulent pour cela, me traitant d’utopiste, et [qui] sont même allés jusqu’à empêcher (ce que j’ai lieu de supposer vrai) d’autres amis disposés à me venir en aide !!! Encore un petit échantillon à l’appui du milieu duquel nous vivons !!! » [5].

Il éprouve une grande admiration pour Victor Considerant, qu’il abreuve de compliments pour son activité. Destinée sociale est un « merveilleux travail [...] qui vous fait le plus grand honneur et doit vous faire bénir par la postérité la plus reculée comme le digne premier et plus distingué disciple de l’immortel Charles Fourier » [6]. Il a rencontré le chef de l’Ecole sociétaire en 1842, quand celui-ci est passé à Strasbourg à l’occasion d’un congrès scientifique, séjour prolongé par six conférences à l’hôtel de ville [7], et attend son retour avec impatience. Après avoir lu le compte rendu de l’anniversaire de la mort de Fourier, le 7 avril 1843, il écrit à Considerant : « votre discours prononcé au banquet m’a fait verser des larmes de joie » [8].

Puis, après ces lettres de 1843, son nom disparaît du fonds des archives sociétaires, sans qu’on en connaisse les raisons.