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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Présentation
Article mis en ligne le 1er juin 2020
dernière modification le 29 mai 2020

par Perrier, Florent, Roche, Gérard
« Pour nous, pour notre compréhension actuelle, L’Ode à Charles Fourier de Breton a ouvert la voie. L’œuvre de Fourier, dont aucune partie ne saurait être laissée à l’écart, toutes concourant à l’effet d’ensemble, cette œuvre éclatée dont on ressent, en chaque fragment, la pulsion vivante, s’apparente plus au poème surréaliste qu’à un programme de parti. Surréalisme ou romantisme, ces deux prolongements du baroque, cela ne revient-il pas au même, du moment que l’on conçoit l’œuvre d’art moins comme un objet dont jouir, que comme l’instrument de contestation du réel appauvri, comme le lieu de la production du surréel ? » René Schérer, Pari sur l’impossible, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 1989, p. 86.

Déjà bien explorées et du vivant même d’André Breton, les relations du surréalisme à la pensée et l’œuvre de Charles Fourier demeurent cependant abordées encore trop souvent d’une manière englobante aux dépens de détails, de strates historiques ou de généalogies politiques précises ainsi laissés dans l’ombre [1]. L’ambition de ce numéro thématique des Cahiers Charles Fourier est de donner accès à des textes dispersés ou à des archives méconnues voire oubliées pour que la redécouverte de Charles Fourier, dans l’orbe du surréalisme, c’est-à-dire après la Seconde Guerre mondiale, soit dès lors entendue dans toute sa complexité comme dans ses multiples nuances, dans toute sa radicalité. À cette fin, il nous a semblé essentiel de remettre d’abord à l’honneur le travail fondamental et pionnier effectué par Simone Debout-Oleszkiewicz depuis les années 50 et notamment ses premiers articles consacrés à l’œuvre du rêveur sublime et publiés, justement, à l’invitation d’André Breton, dans les revues surréalistes ou à l’occasion des Expositions internationales du Surréalisme de 1959 et 1965. Aux côtés de ces textes précurseurs devenus peu accessibles, Simone Debout-Oleszkiewicz — qui découvrit et édita Le Nouveau Monde amoureux, cette « synthèse finale » mue par le mouvement et le désir vers l’autre — a bien voulu ajouter des réflexions et des souvenirs relatifs à sa longue amitié avec l’hôte de la rue Fontaine et nous permettre également, avec l’autorisation de Aube Breton-Elléouët, de publier la presque intégralité de sa correspondance, restée inédite, avec André Breton. Et c’est ici, dans ces échanges passionnés, qu’un des fils possibles se noue pour venir restituer une tradition souterraine animée par la vision commune d’un Fourier foncièrement lié à l’émancipation, une tradition que forment notamment, dans ce numéro, les noms de Philippe Audoin, de Raymond Queneau, d’Octavio Paz, de Michel Butor ou encore d’Annie Le Brun. Cette vision commune qui découle d’une lecture attentive aussi bien qu’enthousiaste pour une œuvre audacieuse caractérisée, selon Simone Debout-Oleszkiewicz, par « une puissante systématisation du désir » où se conjuguent les intuitions prophétiques, un humour agressif et la force d’un imaginaire poétique.

À l’occasion d’un second numéro thématique cette fois organisé autour des archives mêmes d’André Breton, s’ajouteront les noms et les écrits ou correspondances de Jean Gaulmier, Georges Bataille, Jean-Louis Bédouin, Adrien Dax, Emile Lehouck, Jonathan Beecher, Jean-Claude Silbermann, Georges Sirot, Pierre Naville, Georges Blin ou encore Raoul Vaneigem et Jean-Jacques Lebel.

Un chantier s’ouvre donc, nullement exhaustif et par ailleurs tourné vers des constellations postérieures comme celle du situationnisme ou celle d’un art contemporain vivant marqué par cette rencontre du surréalisme avec l’œuvre de Fourier, un chantier étayé en outre par des analyses qui viendront ouvrir d’autres perspectives, pour que cette redécouverte de Fourier, dans l’orbe du surréalisme, soit aussi celle de positions affirmées au profit d’une poétique clairement engagée face aux menaces et catastrophes totalitaires d’alors, à celles d’aujourd’hui.

Nos remerciements les plus vifs et les plus chaleureux vont à Simone Debout-Oleszkiewicz qui a bien voulu accompagner et encourager ce projet avec confiance et détermination depuis plusieurs années ainsi qu’à Aube Breton-Elléouët qui nous a également accordé un soutien sans faille dès le départ et facilité très généreusement l’accès comme la reproduction d’archives issues de l’Atelier André Breton, aux contributeurs du numéro qui ont bien voulu nous enrichir de leurs échanges — Annie Le Brun, Michel Butor (†), Alejandra Riera —, à Thomas Bouchet, véritable maître d’ouvrage, à Pierre-Luc Abramson pour sa traduction d’Octavio Paz, à Nicole Chosson, Annie Trassaert et Martin Verdet, à Michel Antony, Philippe Baudouin, Manuel Bidermanas, Agnès Chekroun, Paul Duchein, Jérôme Duwa, Bruno Elisabeth, Elisabeth Gaulmier, Jean-Michel Goutier, Constance Krebs, Jean-Jacques Lebel, Lulu Ménase, Marie-Laure Morin, Claire Paulhan, René Schérer, aux personnels de la Bibliothèque Littéraire Jacques Doucet et de l’IMEC, aux rédactions du journal Le Monde et de La Nouvelle Quinzaine Littéraire [2].

La bibliographie exhaustive des travaux de Simone Debout-Oleszkiewicz ainsi que l’intégralité d’un long entretien mené avec Nicole Chosson, Annie Trassaert et Martin Verdet, en 2008, dans le cadre du film « Charles Fourier. L’illusion réelle », figurent, complétés par des documents visuels, sur le site de l’Association d’Études Fouriéristes.