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107-108
PREPOSIET Jean : La Profanation du monde. Destin de l’occident (2000)

Paris, Kimé, 2000, 376 p.

Article mis en ligne le décembre 2000
dernière modification le 3 avril 2007

par Ucciani, Louis

C’est sans doute dans le double sens dans lequel nous saisissons le mot de profanation qu’il s’agit de lire ce livre. Profanation c’est la perte du sacré, mais c’est aussi, dans le sens plus commun de l’usage quelque chose qui relève du saccage. Présenté comme une longue historiographie l’ouvrage retrace les moments clés de l’histoire de la philosophie vue comme un long dégagement hors le sacré. Celui-ci est posé, au même titre que l’outil, comme constitutif de l’homme : « Aussi loin qu’on puisse remonter dans le passé de l’humanité, on rencontre des vestiges qui témoignent d’une attitude originelle et d’un comportement de nature religieuse » [10]. La constitution du monde et de l’esprit humain autour de l’idée religieuse, sans doute son apogée à la période médiévale, puis la lente séparation d’avec le religieux, les soubresauts comme retour (Hegel), et enfin, dans le second sens du mot profanation, notre monde, notre modernité. C’est le constat final : « A peine délivré de l’Histoire - en admettant qu’il le soit - l’Occidental n’aurait-il rien de plus pressé que de s’en remettre aussitôt à un autre Dieu : l’Économie capitaliste ? » [298]. Passé du stade de chrétien, sous le règne de Dieu, à celui de citoyen au terme de la première profanation et sous le règne du Dieu Histoire, l’homme devient consommateur, à l’ère de la seconde profanation, toute vouée au Dieu Économie. En ce sens l’homme se serait profané lui-même. S’il y a certes un constat de ce registre pessimiste, pointe autre chose que le long parcours souvent minutieux laisse apparaître, cela a trait à la culture, cela a trait à la philosophie et à leur prodigieux déroulement, comme un vertige devant ces avancées du concept et en même temps quelque chose de l’ordre d’un « tout ça pour ça » ! Le livre alors sans doute doit-il se lire comme une profanation de la philosophie par le réel, une profanation de ce que voulaient y mettre les philosophes. Il faut dès lors le mettre en relation avec le précédent ouvrage de Jean Préposiet (Histoire de l’anarchisme. Paris, Tallandier, 1993), où l’on verrait peut-être la ligne de correction offerte au monde profané.