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105-106
BORDET Gaston : Hugo, hier, maintenant, demain (2002)

Delagrave, CRDP de Franche-Comté, 2002, 222 p.

Article mis en ligne le décembre 2002
dernière modification le 3 avril 2007

par Dubos, Jean-Claude

Gaston Bordet est un admirateur inconditionnel de Victor Hugo qu’il connaît et comprend à merveille et on apprend bien plus à la lecture de son « petit ouvrage » qu’à celle des grosses biographies (si l’on excepte celle de Jean-Marc Hovasse). Bordet suit à la fois l’évolution de l’homme et celle de l’œuvre et, pour l’une comme pour l’autre on peut dire que l’essentiel est dit et avec une admirable clarté. Destinée tout d’abord aux élèves des lycées de Franche-Comté, cette présentation dépasse de loin un public aussi restreint et que tout un chacun aura profit à le lire.

Certes on peut trouver que Gaston Bordet accorde trop d’importance à de simples bluettes : « Elle était déchaussée, elle était décoiffée » et sa passion pour Hugo l’amène à jeter le manteau de Noé sur certaines erreurs ou faiblesses : ainsi, en février 1848, il passe sous silence que Hugo, grand ami du duc et de la duchesse d’Orléans a tenté de proclamer la régence de celle-ci à l’heure même où Lamartine proclamait la République à l’Hôtel de Ville et qu’il a refusé le ministère de l’Instruction Publique que lui proposait celui-ci. De même en juin 1848, comme d’autres députés, Tocqueville, Adolphe Crémieux, Goudchaux, etc. Victor Hugo accompagnera les troupes à l’assaut des barricades (un seul député, Victor Considerant essaiera alors, vainement, de servir de médiateur entre le peuple et l’Assemblée). Enfin en 1872, alors qu’il a lutté sans répit contre Napoléon III, Hugo se contente de quémander auprès de Thiers quelques grâces - dont celle de Rochefort - que Thiers naturellement est trop heureux de lui accorder.

Mais le plus grave reproche que nous ferions à Gaston Bordet est son attaque parfaitement injustifiée contre Alfred de Musset (p. 102) à propos de sa réponse au Rhin allemand de Becker : « Nul Musset, Archinul le poème le plus niais et le plus stupide de la langue française ». Certes, la bluette de Musset est bien inférieure à la Marseillaise de la Paix de Lamartine. Mais s’il s’agit de décerner la palme des poèmes les plus niais et les plus stupides, nous recommandons à Gaston Bordet la candidature des poèmes écrits par Théodore Botrel - l’auteur de la Paimpolaise - pendant la guerre de 1914. Ils mériteraient certainement d’être réédités ainsi que d’autres textes de même inspiration, pour prouver aux français que l’antisémitisme n’est pas la seule forme française de crétinisme littéraire.

Nous citerons seulement la dernière phrase du livre, celle par laquelle Gaston Bordet salue la mort de son idole : « Un homme de cœur, de tête, de pensée, de générosité qui entre dans l’immortalité à laquelle il croyait de toutes ses forces, qui entre pour des siècles dans la légende ».

En 1885, un autre comtois, Charles Grandmougin saluait ainsi Victor Hugo :

« Il faut que ton grand cœur s’indigne ou compatisse
Et, gonflé par l’amour ou la rébellion
Tendre comme une femme ou fort comme un lion
Tu marches dans l’Histoire affamé de justice
Dans le tumulte obscur de cette sombre foule
Le plus humble de nous éprouve obscurément
Qu’avec toi, tout un monde invisible s’écroule
Et qu’un grand astre est mort dans notre firmament ».