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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Boëns, Hubert
Article mis en ligne le 8 décembre 2019

par Desmars, Bernard

Né le 12 janvier 1825 à Charleroi (Belgique), décédé le 21 décembre 1898 à Saint-Gilles (Belgique). Médecin, auteur de travaux scientifiques, adversaire de la vaccination et des théories de Pasteur. Correspondant du Bulletin du mouvement social et proche de La Rénovation.

Hubert Boëns fait ses études supérieures à Louvain, où s’est organisé un groupe fouriériste. Plusieurs étudiants, dont Adolphe Demeur, sont exclus de l’université fin mars 1848 après avoir rédigé une « adresse » félicitant les étudiants allemands pour leur combat en faveur de la liberté. Cette mesure provoque de nouvelles manifestations revendiquant un nouveau règlement universitaire et la rédaction début avril d’un texte de protestation, dont les cinq auteurs – parmi lesquels figurent Hubert Boëns et Léon Wocquier – doivent à leur tour quitter l’université de Louvain [1].

Hubert Boëns poursuit ses études à Liège et obtient d’abord un doctorat ès sciences, puis un « doctorat en médecine, chirurgie et accouchements » (1851). Il s’établit à Liège, où il est chef de clinique à l’Institut ophtalmologique, puis médecin à l’hôpital des cholériques. En 1853, il crée la Gazette médicale de Liège, qui ne paraît que pendant une année, et l’Almanach hygiénique. En 1855, il quitte Liège pour Charleroi. Pendant sa carrière, il est aussi médecin des chemins de fer de l’État, médecin principal de la prison de Charleroi et médecin attaché à la Société des charbonnages réunis de Charleroi. Il est membre de la Société générale des prisons, de la Société de moralité publique et de la Société des gens de lettres [2].

Parallèlement aux soins qu’il prodigue aux malades, Hubert Boëns se livre à des études scientifiques et fait partie de plusieurs sociétés médicales. Après des travaux sur l’hygiène, l’obstétrique et l’ophtalmologie, il est élu en 1864 membre correspondant de l’Académie royale de médecine de Belgique. Il y présente ses recherches sur l’ophtalmie catarrhale et les lésions pulmonaires dues à l’inhalation des poussières de charbon. Il fait aussi partie de la Société d’hygiène de Paris et de la Société française contre la vivisection, dont il est nommé membre honoraire en 1884 [3]. Il adopte des positions très hostiles à la vaccination et s’oppose aux théories de Pasteur sur la contagion. Il fonde en 1879 une Ligue internationale des anti-vaccinateurs ; il participe à des congrès et anime de nombreuses conférences sur ce sujet [4].

D’abord associé aux travaux de la Société Saint-Vincent de Paul de Charleroi et de la Société de Saint-Joseph des faubourgs de la ville, il s’éloigne peu à peu du catholicisme et se rapproche des milieux progressistes, qui réclament l’extension du suffrage, l’instruction obligatoire, l’amélioration des conditions de vie des classes populaires. En 1869, il adhère à l’Association libérale de l’arrondissement de Charleroi. Dans la décennie suivante, il devient un partisan de la philosophie positiviste de Littré – il publie plusieurs articles dans La Philosophie positive, dirigée par Émile Littré et Grégoire Wyrouboff [5] – et un militant de la libre pensée ; il est l’auteur d’un Catéchisme du rationaliste et préside la Société des rationalistes de Lodelinsart (aujourd’hui dans la commune de Charleroi). En 1879, des libres penseurs créent la Ligue progressiste – bientôt rebaptisée Fédération rationaliste – qui milite pour l’enseignement gratuit, laïc et obligatoire, la suppression du livret ouvrier, la réforme des caisses de prévoyance pour les ouvriers mineurs et le suffrage universel masculin. Boëns – lui-même favorable au vote des femmes – en est le président. Il assiste au congrès international de libre pensée de Bruxelles en mars 1880. Il est en relation avec César de Paepe, l’un des fondateurs du mouvement socialiste belge et militant de la libre pensée [6].

À partir de 1882, il participe à la rédaction de L’Ami du peuple  ; « il se réclame alors du socialisme rationnel, positiviste et progressif, qu’il oppose au socialisme anarchique et révolutionnaire » [7]. Il critique la notion de lutte des classes et récuse l’opposition entre le capital et le travail, ce qui, progressivement, l’éloigne de ses amis socialistes. Il est exclu de la Fédération rationaliste fin 1888.

Il lit le Bulletin du mouvement social auquel il écrit en 1880 [8]. Dans les années 1890, il est en relation avec l’École sociétaire dirigée par Adolphe Alhaiza. Il verse 15 francs pour la réalisation de la statue de Fourier [9]. La Rénovation apporte son soutien à sa « guerre savante et légitime à la médecine néfaste des antiseptiques, des poisons et des vaccins » [10]. L’organe fouriériste annonce son décès : « sans être phalanstérien déclaré, le docteur se montrait sympathique à notre doctrine et à nos principes » [11].