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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Ballard, Jacques-Guillaume
Article mis en ligne le 11 juillet 2008
dernière modification le 9 mai 2014

par Desmars, Bernard

Né à Autun (Saône-et-Loire) le 14 janvier 1801, décédé à Charnay-lès-Mâcon (Saône-et-Loire), le 6 mai 1880. Médecin dans l’armée de terre. Frère de Claude Ballard. Maire et conseiller général. Auteur d’un projet de « ménage sociétaire »

Fils d’un médecin-chef de l’hôpital militaire de Bourbonne-les-Bains (Haute-Marne), il entre lui-même dans l’armée très jeune (dès 1817) et y fait des études de médecine qui le conduisent au doctorat en obtenu en 1825. Il exerce comme chirurgien dans différents hôpitaux militaires, notamment à Perpignan, à Bourbonne-les-Bains (là où a déjà exercé son père) et à Besançon, où il finit sa carrière en 1850. Il s’installe alors à Charnay-lès-Mâcon, la commune natale de sa femme, Sophie-Elisabeth Delaye, dans leur château de Saint-Léger.

Ballard a adhéré aux idées fouriéristes dès la monarchie de Juillet. En 1847 - il est alors à Besançon - il fait partie des premiers actionnaires de l’Union agricole du Sig, tout comme son frère Claude Ballard, officier du génie [1]. En 1850, juste avant son départ de la Franche-Comté, il publie deux brochures proposant une nouvelle organisation de la pratique médicale à Besançon, largement inspirée des principes fouriéristes : les médecins se réuniraient en association et se répartiraient les différents quartiers de la ville ; ils délivreraient gratuitement leurs soins et les médicaments aux habitants ayant souscrit à une assurance ; le produit des cotisations versées par les familles, proportionnellement à leur richesse, servirait à rétribuer les praticiens, qui, désormais, aurait davantage intérêt à faire de la prévention : « demander aujourd’hui aux avocats d’empêcher les procès et aux médecins de supprimer les maladies serait un non-sens ; intéressez-les à leur diminution, le problème sera résolu. Il faut que tout le monde soit persuadé que le seul moyen de gouverner la société est de savoir l’organiser » [2]. Enfin, les liens établis entre les médecins grâce au principe associatif - sur lequel Ballard insiste beaucoup - favoriseraient une élévation de leurs connaissances scientifiques. Toujours sous la Seconde République, il adresse au ministre des Finances un texte sur le crédit afin de résoudre la question financière.

Dans les années 1860-1870, il est l’un des actionnaires de la Librairie des sciences sociales ; il s’abonne à La Science sociale (1867-1870), puis, dans la décennie suivante, au Bulletin du mouvement social (1872-1879) [3] ; en 1866, il participe au banquet organisé à Paris en 1866 pour commémorer la naissance de Fourier. Comme d’autres disciples à la fin des années 1860, Ballard tente de créer une « association partielle », anticipation de l’association intégrale à venir : il projette la construction d’un immeuble, « grand hôtel des familles » qui accueillerait un « ménage sociétaire » composé de 300 à 400 personnes d’âges et de sexes différents ; l’édifice comprendrait quatre-vingt-six appartements privés (un salon, une salle à manger, deux chambres, des cabinets de toilette, une cuisine, une cave, un grenier), des salles communes (salle à manger, salon, cuisines) et des services collectifs (bains et douches, gymnases et salles d’exercice, cafés et cercles, bibliothèques et cabinets de lecture...). L’ensemble nécessite deux millions de francs ; mais Ballard envisage de commencer plus modestement avec d’abord 24 appartements et déclare avoir déjà trouvé un terrain pour commencer la construction.

Jacques-Guillaume Ballard, "Grand hôtel des familles"
La Science sociale, 1er mai 1869

Mais il ne parvient pas à convaincre ses condisciples, qui à la même époque, fondent un modeste « Cercle des familles », salon de discussions et de jeux créé par des phalanstériens parisiens, auquel il adhère [4].

Ballard s’intéresse également à la politique, nationale et locale. En 1867, alors que la réforme de la conscription fait l’objet de nombreux débats dans l’opinion et dans les milieux politiques, il adresse à Napoléon III un projet de réorganisation du recrutement militaire, dans lequel les effectifs présents sous les drapeaux diminueraient très fortement, tandis qu’un grand nombre de Français, constituant la réserve, pourraient être mobilisés en cas de conflit ; cependant, si son « but est de porter au plus haut point la force de résistance de l’armée », il s’agit également de « restreindre autant que possible les idées de conquête, aussi bien chez nous, où le vieux sang du peuple français se laisse facilement entraîner à la guerre, que chez nos voisins ». Ballard, en réduisant le temps du service militaire, accusé de favoriser le départ des jeunes gens des campagnes vers les villes, souhaite également empêcher la dépopulation rurale [5].
L’année suivante, en 1868, il est élu membre du conseil général de Saône-et-Loire par les électeurs du canton de Mâcon Sud (il est réélu en 1871, mais ne se représente pas en 1877). Il est candidat, mais battu, aux élections législatives de 1869 et participe à la campagne pour le « non » lors du plébiscite de mai 1870, quand Napoléon III veut faire approuver ses réformes constitutionnelles. De 1871 à 1874, puis de 1876 à 1880, il est maire de Charnay-les-Mâcon ; il y fonde une société de secours mutuels, un poste médical et une compagnie de sapeurs-pompiers ; il favorise le développement de l’enseignement en agrandissant l’école des garçons et en reconstruisant l’école des filles (il apporte parfois sa propre contribution financière quand les ressources communales s’avèrent insuffisantes), ainsi qu’en favorisant l’enseignement des adultes. Par son testament, il fait plusieurs legs au profit des habitants de sa commune (un don au bureau de bienfaisance, 3000 francs pour aider à la création d’une école de hameau et des livres d’histoire, de science et d’histoire naturelle pour former « le noyau d’une bibliothèque utile ») [6]
Notable local qui représente une sorte de « fouriérisme municipal », dont on trouve plusieurs exemples dans l’Ecole sociétaire, Ballard bénéficie apparemment d’une grande estime dans les environs de Mâcon ; lors de ses obsèques, « un long convoi populaire de gens des campagnes, venus en souvenir et en reconnaissance de leur guérisseur et de leur bienfaiteur, suivait le cercueil de cet homme de bien populaire [...] pendant que la jeune fanfare de Charnay jouait des marches funèbres ». Le maire de Mâcon, son successeur au conseil général, fait « l’éloge du philosophe, du républicain, du savant, du médecin, d’un bon citoyen ». Tandis que l’un de ses amis souligne, dans la nécrologie parue dans le journal local, l’originalité, voire les excentricités de Ballard, doué d’une « imagination toujours en ébullition » [7].

Nécrologie de Ballard
Le Journal de la Saône-et-Loire, 10 mai 1880