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"O sublime Fourier ! ô vieux chercheur de mondes !" Constant Hilbey (1855)
Article mis en ligne le 21 juin 2010

par Detourbet, Quentin

Représentant des Voix d’en bas, Constant Hilbey est né en 1817 à Magny-le-Preulle dans le Calvados. D’abord simple ouvrier tailleur, il entre ensuite dans la carrière littéraire à la toute fin de la monarchie de Juillet. En 1844, il publie à Paris un recueil de poésies sous le titre Un courroux de poète, avant de tenter sa chance sur les planches de l’Odéon avec une comédie en un acte, Ursus. « Le tout, vers et prose, était aussi peu neuf que possible », à en croire le Grand dictionnaire universel du XIXe siècle de Pierre Larousse. Une brochure, La vénalité des journaux, vaut à Hilbey un succès à scandale et quelques démêlés judiciaires. Au lendemain de la Révolution de 1848, il fonde une feuille éphémère maratiste, Le Journal des sans-culottes, dans laquelle il attaque violement les membres du Gouvernement provisoire et la nouvelle Assemblée constituante. Le coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte, le 2 décembre 1851, le contraint à l’exil, sans doute en Suisse, où il fait publier, quatre ans plus tard, ses Poésies. Le ton d’Hilbey est volontiers mélancolique, un peu mièvre ; l’ode à la gloire de Fourier, le « Messie du socialisme », détonne parmi le récit de ses déboires sentimentaux !

Comme ta lèvre est mince et ton crâne chenu,
O sublime Fourier ! ô vieux chercheur de monde !
O Christ industriel, encore méconnu,
Où n’as-tu pas porté le scalpel ou la sonde ?

Ton œil d’aigle a percé les champs de l’inconnu,
Et surpris d’Oromaz la science profonde ;
Et le vase penché, jetant le contenu,
Tu répandis à flots la lumière féconde.

Et dans le dénûment, de besoins tiraillé,
Isolé dans Lutèce, incompris et raillé,
Tu marchas quarante ans seul avec ton génie ;

Et détournant les yeux de notre amas d’erreurs,
Tu vécus solitaire au milieu des splendeurs
Du règne d’harmonie.

Poésies, 1855

Notes
Oromaz : le principe du Bien, selon le prophète perse Zoroastre
Le poème de Hilbey est reproduit dans Thomas (E.), Voix d’en bas. La poésie ouvrière au XIXe siècle, Paris, Maspero, 1979.