Bandeau
charlesfourier.fr
Slogan du site

Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Le Rousseau, Julien (Julien Jean-Baptiste Bruley, dit)
Article mis en ligne le 9 septembre 2011
dernière modification le 1er février 2015

par Cordillot, Michel, Desmars, Bernard

Né à Ménilmontant le 6 décembre 1812, Julien Bruley est destiné par son père à l’architecture. Mais il se tourne vers les études littéraires et les questions religieuses.
Il rejoint l’Église française peu après sa fondation sous le nom de Julien Le Rousseau ; l’abbé Châtel fait de lui son vicaire général à Nantes. Secondé par l’abbé Saudron, il rallie plusieurs prêtres qui font preuve de beaucoup de zèle et de dévouement, réussissant à faire de la succursale nantaise une institution relativement florissante. Il est même un instant question d’installer un évêque dans cette ville, mais la chose ne peut se faire faute de fonds. Puis, à la suite du décès subit de plusieurs de ses ministres (Saint-Estève en 1834, Burtin en 1835 et Saudron en 1836), l’Église française marque le pas dans l’Ouest.
En 1837-38, l’abbé Châtel envoie Le Rousseau en mission en Belgique. Sacré évêque avec le titre de vice-primat de l’Église française, il ouvre le 1er octobre 1837 une succursale de l’Église française à Bruxelles, située rue Royale, à la porte de Schærbeck. Inaugurant le bâtiment encore en chantier, il reçoit la foule des fidèles en compagnie de l’abbé Hersen non pas revêtu de ses ornements sacerdotaux, mais en costume civil. Il prononce à cette occasion un discours sur la réforme et ses progrès. Durant son séjour en Belgique, il donne également des cours de philosophie et de morale à la Société de concerts du peuple de Bruxelles.
Mais l’Église française est déjà engagée sur la voie d’un déclin irrémédiable. En 1839, Le Rousseau rentre en France et regagne la région nantaise (où il a fondé une feuille intitulée Le Philophane). La rupture intervient probablement au début des années 1840. À mesure que l’Église française, victime du harcèlement des autorités, perd de son influence, Le Rousseau semble se rapprocher du mouvement fouriériste. De 1843 à 1848, il dirige L’Observateur des Pyrénées qui paraît à Pau. Il prend également part à la rédaction de La Phalange et de La Démocratie pacifique, et publie à la Librairie phalanstérienne un ouvrage sur la phrénologie.
Julien Le Rousseau semble faire partie de la fraction du mouvement fouriériste qui regarde avec circonspection la décision prise par Considerant d’engager l’École sociétaire dans la voie de l’action politique, et plus encore son ralliement au mouvement démoc-soc au début de l’année 1849. Dans son livre De l’organisation de la démocratie, paru un an jour pour jour après la manifestation manquée du 13 juin 1849, il dénonce l’impuissance de la « politique pure » (tout en défendant la forme républicaine de gouvernement et le suffrage universel), et se dissocie clairement de Considerant : « La journée du 13 juin, telle qu’elle a été préparée et conduite, a été une impardonnable faute de la démocratie » (p. 140).
Définitivement installé à Paris, il devient une figure connue de la presse parisienne, et il est l’un des fondateurs en avril 1857 du Courrier de Paris, dont il est également le premier gérant.
Devenu de plus en plus conservateur, il justifie son ralliement à l’Empire en alléguant le fait que le régime est « très favorablement disposé à l’égard des réformes sociales pacifiques, les seules véritablement fécondes » (La Science sociale, 16 septembre 1869). Il n’a pas pour autant rompu avec ses idéaux fouriéristes, et quand les membres de l’École décident en 1866 de créer une nouvelle revue intitulée La Science sociale, ils font appel à lui pour en assurer la rédaction du fait de son expérience en matière de presse. Il en est effectivement l’un des trois principaux rédacteurs, avec Charles Pellarin et François Barrier. Mais les ventes ne réussissent pas à décoller (600 abonnés en 1868). Le Rousseau est alors chargé d’enquêter sur le fonctionnement de la librairie fouriériste afin de proposer des mesures pour face aux difficultés financières qu’elle traverse. En 1869, il quitte la direction de La Science sociale, puis entre en conflit ouvert avec son successeur désigné, Valère Faneau, à qui il reproche d’afficher son hostilité au régime impérial et son anticléricalisme, et d’avoir pris position en faveur de l’Internationale et de la « guerre sociale ». Il se voit en retour accusé de se comporter comme un disciple de Le Play et non en véritable fouriériste. En effet, contre la majorité de ses coréligionnaires, il se prononce en faveur de la participation de préférence à la coopération (sans jamais poser la question de la répartition du pouvoir au sein de l’entreprise).
Contrairement à Considerant, Le Rousseau se montre violemment hostile à la Commune, dépeignant les insurgés comme des « malfaiteurs », et appelant à la répression légale « la plus énergique » (La Prospérité de l’État..., p. 159-264). Paru en 1873 avec une dédicace « Au peuple », son livre Éléments d’économique progressive entend lutter contre « les menaces du socialisme confus et révolutionnaire » en exposant de façon très simplifiée les solutions préconisées par les fouriéristes. Politiquement, il finit par se rallier à la monarchie héréditaire (La Prospérité de l’État..., chap. 17, p. 313-329).
Julien Le Rousseau meurt en 1891.