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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Délias, Germain
Article mis en ligne le 25 janvier 2018

par Desmars, Bernard

Né le 3 décembre 1843, à Mézin (Lot-et-Garonne), décédé le 28 novembre 1908 à Paris (Seine), 15e arrondissement. Professeur à la Maison rurale d’expérimentation sociétaire, à Ry (Seine-Maritime). Journaliste, dirigeant de L’Avenir des campagnes. Participant à des banquets fouriéristes.

Fils d’un propriétaire, Germain Délias, devenu professeur, part en Guadeloupe pour fonder un collège. Peut-être est-ce à ce moment, qu’il rencontre sa femme, Thérèse Brefford, née à Lamantin (Guadeloupe), veuve d’un premier mari [1]. De retour en métropole, il enseigne un moment à la Maison rurale de Ry fondée par le fouriériste Adolphe Jouanne à un peu moins de 20 km de Rouen. Cet établissement ayant bénéficié d’un important legs de Florimond Boulanger, disciple de Fourier et architecte ayant passé une grande partie de sa vie en Grèce, Germain Délias contribue à la publication posthume d’Ambélakia ou les associations des municipalités helléniques avec documents confirmatifs, recueillis et mis en ordre par F. Boulanger.

Au milieu des années 1880, Germain Délias crée, avec l’aide de Jules Rouby (ou Roubi) L’Avenir des campagnes, un mensuel destiné au monde agricole ; il en est le directeur gérant. Selon Charles Limousin, les deux fondateurs du nouvel organe, tout en étant des fouriéristes « orthodoxes » partisans de « l’association intégrale », ont compris qu’à défaut d’une hypothétique réalisation phalanstérienne, il faut utiliser le contexte – la dépression agricole, le mouvement en faveur des coopératives, mutuelles et syndicats – pour diffuser dans le monde agricole les principes associationnistes d’inspiration fouriériste [2]. Ce périodique paraît de 1885 à 1890. On y trouve des articles de fouriéristes – Wladimir Gagneur sur les fruitières du Jura » [3], Hubert Doderet sur les bienfaits de l’association agricole [4] –, la présentation du « comptoir communal » et la dénonciation du « parasitisme commercial », des « fourberies et majorations commerciales » et des « falsifications » [5] ; L’Avenir des campagnes apporte des informations sur la Ligue du progrès social, organisation fondée par Étienne Barat et Jenny Fumet pour prendre le relais de l’École sociétaire [6] ; il signale la parution d’ouvrages rédigés par des fouriéristes, même s’ils n’ont que peu de rapport avec l’activité agricole (L’Utopiste, de Victor Marchand ; Douze sonnets astronomiques d’Émile Baudry) [7] ; il mentionne aussi le Familistère de Guise de Jean-Baptiste Godin, avec des avis contrastés, élogieux dans un numéro, très critique dans un autre : le Familistère « offre une vivante image des merveilles réalisées par l’association du capital, du travail et du talent » [8] ; mais, même si le « Familistère de Guise constitue certainement la preuve expérimentale la plus décisive qu’on puisse invoquer aujourd’hui en faveur de l’association du capital et du travail », « on peut ne pas admirer, et nous sommes absolument dans ce cas, l’outrecuidante personnalité de M. Godin […], cet homme qui a eu le tort de mêler des erreurs de son crû aux idées géniales qu’il plagiait » [9]. On y trouve aussi des informations sur le Journal du magnétisme et la Société magnétique de France, à laquelle participent plusieurs de leurs condisciples fouriéristes (Eugène Nus, Eugène Bonnemère) [10].

À propos de la condition sociale des travailleurs dans l’agriculture, Germain Délias regrette que les employeurs puissent « s’effrayer de ces mots de participation et d’association » ; il fait l’éloge de l’association du capital et du travail ; « hésitons d’autant moins que le maintien du statu quo, c’est la révolution sociale à bref délai, au lieu que l’association du capital et du travail, c’est la sécurité, le salut » [11].

Il est l’un des témoins en 1896 du mariage de Vincent Templier, probablement l’un de ses anciens élèves à Ry, par ailleurs fils de Louis Templier et de Rosalie Joséphine Coulembier, autres soutiens de Jouanne.

Il participe assez régulièrement, à partir de 1894 et surtout après 1900, aux banquets organisés chaque 7 avril pour commémorer la naissance de Fourier. Il est alors un membre du courant fouriériste dirigé par Adolphe Alhaiza, dont La Rénovation est l’organe. Il se montre cependant en désaccord avec Alhaiza quand celui-ci, rejoignant les socialistes colinsiens, se prononce pour la « nationalisation du sol » ; Délias rappelle que la doctrine fouriériste prévoit une association agricole au niveau communal, mais pas une collectivisation de la terre au niveau national [12].

Son décès est annoncé dans La Rénovation, en novembre-décembre 1908 ; selon l’auteur de la nécrologie, le défunt était « un des derniers militants de l’application phalanstérienne », c’est-à-dire partisan de l’essai sociétaire ; mais « la vie de celui dont nous déplorons la perte ne fut pas heureuse. De dures déceptions, des deuils et des revers cruels assombrirent ce caractère élevé et ce cœur sensible qui ne s’ouvraient plus qu’à de rares intimes » [13].