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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Lafosse, Georges (Alexandre Hippolyte)
Article mis en ligne le 6 septembre 2018
dernière modification le 5 septembre 2018

par Desmars, Bernard

Né le 24 février 1862 à Metz (Moselle), décédé le 4 février 1935, à Vanves (alors dans le département de la Seine, aujourd’hui dans les Hauts-de-Seine). Médecin militaire, puis médecin civil spécialiste de l’hygiène et de la formation des infirmières. Membre vers 1900 de l’Union phalanstérienne et de l’École Sociétaire Expérimentale, proche du mouvement coopératif, co-fondateur de la colonie du Vaumain.

Georges Lafosse est le fils d’un officier d’infanterie ; sa mère, Jeanne ou Jenny Renaud est la fille d’Hippolyte Renaud, l’auteur de Solidarité, l’un des ouvrages de propagande fouriériste les plus diffusés.

Georges Lafosse (Vivre à Angers, octobre 2008, n°326)

Son enfance se passe d’ailleurs en compagnie de son grand-père, qui vit au domicile de ses parents à Metz, puis à Épinal après le rattachement de l’Alsace et de la Moselle à l’Empire allemand (1871). Il fait des études de médecine et soutient une thèse à la faculté de Paris en 1887. Il effectue quelques années au service de la Marine ; il est chargé d’un cours à l’École de médecine navale de Toulon (1888-1889) ; puis il effectue une campagne au Tonkin (1889-1890). Dans les années 1890, il est chef du laboratoire de l’École de médecine d’Alger. Il obtient en 1899 une licence ès sciences à la faculté de Toulouse. En 1900, il est retraité comme médecin major de la marine, pour infirmités contractées en campagne. Dans les années suivantes, il est « chargé, à titre officieux, de la direction des exercices pratiques de microbiologie générale » à la faculté des sciences de Toulouse, puis il est « préparateur de pathologie générale » à la faculté de médecine de la même ville [1].

Fouriérisme et coopération

Il participe au début du XXe siècle aux activités de l’École Sociétaire Expérimentale (É.S.E.) et de l’Union phalanstérienne, deux groupes fouriéristes favorables à la réalisation d’un essai sociétaire. Il est proche également des dirigeants de la Chambre consultative des associations ouvrières qui rassemble des coopératives de production. Il tient dans L’Association ouvrière, l’organe de la Chambre consultative, une rubrique intitulée « Causerie sur l’hygiène », où il prodigue des conseils pour éviter certaines maladies, par exemple la tuberculose [2].
Selon les dirigeants coopératifs,

M. le docteur Lafosse est un esprit que préoccupent toutes les questions sociales et qui s’intéresse tout particulièrement au mouvement associationniste et coopératiste. Nous avons en lui un ami dévoué qui ne se contente pas d’affirmer sa sympathie par de simples déclarations de principes, mais qui agit et collabore avec nous et qui a notamment apporté à l’Orphelinat [de la coopération] un concours et dévoué et effectif.

Raphaël Barré, l’un des administrateurs de la Chambre consultative, directeur de la Banque coopérative et fondateur de l’Orphelinat, ajoute que Lafosse « ne cesse de faire une propagande fructueuse qui a déjà amené à notre œuvre plusieurs membres honoraires et dames patronnesses » [3]. Cependant, Lafosse aimerait introduire dans cet orphelinat une formation aux activités agricoles, à côté de l’apprentissage artisanal et industriel et des activités d’enseignement. Les coopérateurs âgés pourraient servir de moniteurs pour les ateliers.

Reste à se pourvoir des éléments que vous ne trouverez pas dans le milieu ouvrier : un chef de culture, et l’instituteur à l’esprit large qui saura rompre avec les traditions, avec les rites de l’analyse grammaticale ou le narré des exploits de Childebert XXIV, pour organiser un enseignement scientifique élémentaire vraiment pratique, doublé d’une éducation sociale saine et solide…, l’idée primordiale de solidarité doit en être la pierre d’assise [4].

Bientôt, des enfants non-orphelins pourraient être admis dans l’établissement, qui « pourrait servir de noyau à [des] entreprises futures », caractérisées par « la double exploitation simultanément industrielle et agricole » [5].

Les dirigeants de l’Orphelinat répondent à Lafosse qu’ils considèrent ce « projet comme excellent » ; mais la modicité de leurs ressources les empêche d’aller dans cette direction pour le moment [6].

Pour la réalisation d’un phalanstère

Peu après cette correspondance, Lafosse se déplace à Paris et se rend à la Chambre consultative où il souligne encore sa volonté de contribuer au développement de l’Orphelinat de la coopération [7]. Quelques jours plus tard – le 8 novembre 1901 – il préside l’assemblée trimestrielle de l’É.S.E ; en clôturant la séance, il souhaite que « l’É.S.E. voit voie revenir à elle les phalanstériens dont elle s’est détachée parce qu’elle ne voulait pas se contenter ‘’d’entretenir le feu sous la cendre’’ et qu’elle aspirait à des réalisations pratiques ». Sans doute vise-t-il ici les fouriéristes du groupe de La Rénovation, dirigé par Adolphe Alhaiza, dont l’objectif se limite à la perpétuation de la mémoire du fouriérisme [8].

Il est aussi membre de l’Union phalanstérienne du Midi, un groupe formé par Eugène Verrier et qui prévoit des expérimentations sociétaires. Il est l’un des co-signataires d’un « Manifeste de l’Union phalanstérienne du Sud de la France », avec Verrier (de Nice) et Leydet (de Marseille) [9].

En 1902, le groupe d’Alhaiza se rapproche des socialistes colinsiens et, avec ces derniers, envisage la nationalisation du sol par l’État. Un certain docteur Lafosse ayant déclaré soutenir ce projet, Georges Lafosse signale à l’Union phalanstérienne du Midi qu’il doit s’agir d’un homonyme et que lui-même n’est pas favorable à la nationalisation du sol ; il se présente comme « un phalanstérien presque orthodoxe », modifiant « très peu la conception primitive » [10].

Vers 1903, les fouriéristes de l’École Sociétaire Expérimentale prévoient de s’installer dans un château situé sur la commune du Vaumain, près de Beauvais (Oise). Lafosse est l’un des dix « pionniers sociétaires », avec Julie Avez-Délit, Amédée-Jules Duponchel, René Vachon, le coopérateur Alexandre Vila. Il ne semble pas toutefois qu’il se soit réellement installé au Vaumain. L’existence de cette colonie est très éphémère.

Un médecin hygiéniste

Tout en enseignant l’hygiène à la faculté de médecine de Toulouse (1905-1910), Lafosse dirige le bureau municipal d’hygiène de Bagnères-de-Bigorre (de 1904 à 1910) ; il y crée une station de désinfection et le laboratoire municipal de microbiologie ; il organise l’inspection sanitaire des écoles ainsi qu’un enseignement d’hygiène dans les établissements scolaires de la ville. En 1910, il quitte le Sud-Ouest. Il est nommé directeur du bureau municipal d’hygiène d’Angers et médecin-inspecteur des écoles de la même ville, fonctions qu’il occupe jusqu’en 1916 ou 1917. Parallèlement, il s’occupe aussi du bureau d’hygiène de Saumur en 1913 et 1914. Son activité et ses travaux lui valent un prix en 1913 à l’Exposition universelle de Gand.

En 1917, il rejoint la région parisienne. Il est chargé de former des équipes sanitaires pour les troupes françaises et alliées. Après la fin de la guerre, il assume diverses responsabilités qui concernent principalement l’hygiène et la formation des infirmières. Il est professeur de prophylaxie des maladies contagieuses et chef des travaux de pratique sanitaire à l’Institut Lannelongue d’hygiène sociale à Paris (1917-1925), mais aussi professeur d’hygiène et directeur des études à l’école des infirmières visiteuses du Comité national de défense contre la tuberculose (1920-1925) ; il dispense un enseignement pratique pour les agents des services publics d’hygiène départementaux (1918-1925). Il remplit un rôle de « conseiller instructeur technique » au ministère de l’Hygiène (1920-1921) ; puis, il appartient au conseil de perfectionnement des écoles d’infirmières au même ministère (1922) ; il participe à l’organisation de l’École des infirmières à l’Institut Lannelongue, dans son annexe de Vanves (1922-1925). Il assure la vice-présidence de la section « Enseignement de l’hygiène » à l’Exposition internationale du Centenaire de Pasteur, à Strasbourg (1923), lors de laquelle il reçoit un prix. Il est l’un des créateurs en 1923 de la revue L’infirmière française, revue mensuelle d’enseignement technique, dont il est l’un des rédacteurs en chef [11]. Il est fait chevalier de la Légion d’honneur en septembre 1923. À la veille de sa mort, il est encore directeur de l’École pratique sanitaire et de l’École des infirmières de l’Institut Lannelongue. Son nom est attribué à une rue de Vanves.