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Glatigny, Jacques François
Article mis en ligne le 26 avril 2023

par Desmars, Bernard

Né le 18 septembre 1813 à Laon (Aisne), décédé le 24 décembre 1888 à Laon. Employé de la préfecture de l’Aisne, puis secrétaire de la mairie de Laon, et ensuite conseiller municipal et maire à Laon. Correspondant de l’École sociétaire, dans la deuxième moitié des années 1840, auteur d’une brochure sur les boulangeries sociétaires.

Fils d’un relieur, Jacques François Glatigny fait ses études au collège de Soissons ; âgé de 18 ans, il entre dans les services de la préfecture de l’Aisne comme employé, avant d’accéder au poste de sous-chef de bureau. En 1838, il devient secrétaire en chef de la mairie de Laon. Il se marie en 1840 avec Eulalie Godon, la fille d’un ancien avoué devenu propriétaire, et sœur de Jules Charles Godon, avocat.

Tombe de Jacques François Glatigny

Il est lui-même témoin lors du mariage de son ami Godon et de Sophie Vlaminck en 1842 et lors de la naissance de leurs enfants en 1843 et 1848.

Comme secrétaire de mairie, Jacques François Glatigny pèse d’un poids important dans la vie municipale : « à un moment où les conseillers municipaux remplissaient à tour de rôle l’intérim de la mairie, M. Glatigny était le véritable maire de Laon », écrit l’auteur de sa nécrologie dans le Courrier de l’Aisne, qui ajoute que « c’est pendant un de ces intérims que M. Glatigny créa [une] Société de secours mutuels », la première à Laon, dont, lors de son décès, il est le président d’honneur [1].

Boulangerie sociétaire

Son engagement fouriériste est repérable dans la première moitié des années 1840 : en octobre 1843, il envoie à l’École sociétaire un texte, publié dans La Démocratie pacifique, revendiquant un meilleur accueil des indigents dans les hospices [2].

Il recueille les souscriptions et abonnements versés par les phalanstériens de Laon, qu’il envoie au centre parisien de l’École sociétaire ; il participe lui-même à la souscription organisée par La Démocratie pacifique pour offrir une médaille à Eugène Sue, « défenseur des classes sacrifiées et promoteur de l’organisation du travail » [3].

Il est l’auteur d’une brochure sur les boulangeries sociétaires publiée en 1847. L’ouvrage, bien documenté, comprend trois parties ; la première propose des « aperçus d’économie sociale appliquée aux subsistances », où l’auteur insiste sur la nécessité d’une « organisation » des subsistances afin d’éliminer « la concurrence anarchique de commerçants » ; il élargit son propos à l’application des principes de l’association du capital, du travail et du talent à l’agriculture, puis au commerce et à l’industrie. La seconde partie est plus spécifiquement consacrée aux problèmes du marché du pain (et notamment à la taxe sur le pain) et à l’organisation matérielle d’une boulangerie, en s’appuyant sur la situation statistique de la population et de la consommation de pain à Laon, et en montrant les avantages qui en résulteraient pour les familles pauvres ; il examine aussi les projets et les réalisations de boulangeries sociétaires en France, en Belgique et en Suisse. Enfin, l’ouvrage propose une « formule des statuts d’une boulangerie sociétaire », largement inspirée de celle ouverte à Genève, et fournit des informations un projet d’une boulangerie communale à Lyon, des mesures prises à Bruxelles sur l’approvisionnement en pain et sur un projet de boucherie sociétaire à Besançon.

Quand survient la révolution de février 1848, Glatigny s’enthousiasme pour le nouveau régime, qui ouvre de grandes espérances pour l’idée phalanstérienne : « la sainte cause a triomphé, la liberté est reconquise ; à nous de labourer et d’ensemencer plus ardemment que jamais le terrain social, et la récolte sera prochaine et magnifique » ; à Laon même, « où la République a, depuis moins d‘une semaine, poussé de vigoureuses racines, il y aura du bon vouloir dans tous les esprits en faveur des masses ouvrières ». Aussi, il « prépare une ardente propagation parmi les ouvriers avec quelqu’espoir de succès » [4]. Il est en relation avec Jean-Baptiste Godin [5], aux côtés duquel il figure sur une liste de candidats à l’Assemblée constituante, de même que Léon Magnier, le directeur du Courrier de Saint-Quentin [6]. Aucun des trois n’est élu. Quelques mois plus tard, il participe au congrès phalanstérien organisé le 15 octobre à Paris [7].

Il participe à l’automne 1850 à un projet « d’association fraternelle » devant réunir les patrons et les ouvriers de Laon ; il figure au sein de la commission chargée d’étudier les statuts [8].

En 1851, quand Jules Duval pense publier un organe sociétaire, Le Moniteur de l’association, Glatigny se montre très intéressé par ce projet, qui ne voit finalement pas le jour [9].
Il ne semble plus avoir de relation avec le mouvement fouriériste après la Seconde République.

Conseiller municipal, puis maire

Aux lendemains du coup d’État du 2 décembre 1851, il est révoqué de ses fonctions de secrétaire général [10] en tant que « suspect pour ses opinions républicaines » [11]. Il part vivre à Paris, où pendant environ dix ans, il travaille pour le Journal du Palais et le Recueil Sirey [12]. Il revient ensuite dans sa région natale ; il s’installe d’abord à Presles-et-Thierny (Aisne), où il est élu conseiller municipal en 1865. En 1868, il s’établit à Laon, et deux années plus tard, en août 1870, il entre au conseil municipal. Nommé adjoint en mai 1871 [13], il est désigné maire en août suivant [14], à chaque fois par le gouvernement. Ayant abandonné toute activité professionnelle, il se consacre aux affaires communales, et en particulier « à l’amélioration sanitaire » de Laon et « à l’extension du service scolaire » [15], avec la construction d’un lycée, de bâtiments pour les écoles primaires et d’une École normale [16]. Il reçoit la Légion d’honneur en 1880 [17]. Régulièrement réélu au conseil municipal – il est le conseiller qui reçoit le plus de voix – il reste maire, d’abord nommé par le pouvoir exécutif, puis élu par le conseil municipal, jusqu’en 1887 [18]. Il entre alors en conflit avec le préfet, dont il ne peut accepter la « manière d’agir envers un républicain d’avant 1848, âgé de 75 ans et maire du chef-lieu du département depuis plus de seize ans » [19], il démissionne en octobre 1887.

Son décès suscite la parution de plusieurs articles dans la presse locale. Un service religieux est célébré, et, outre les notables locaux (préfet, député, sénateur, magistrats, officiers, conseillers généraux, etc.), le conseil municipal, des délégations du lycée, des écoles normales de garçons et de filles, de la Société de gymnastique et de la Société de secours mutuels, assistent à ses obsèques. La Ville de Laon fait construire un tombeau à sa mémoire dans le cimetière de Saint-Just, avec un portrait en bronze du défunt. Sa veuve décède en janvier 1901 [20].