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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

7-14
Amour rédempteur
Article mis en ligne le décembre 1997
dernière modification le 10 décembre 2006

par Guillaume, Chantal

Une récente biographie consacrée à l’écrivain Colette s’aventure à prétendre que Colette était fouriériste [1]. Il y a dans cette affirmation quelque chose d’irritant (Colette, peu portée à des programmes de révolution sociale ! n’apparaît pas comme lectrice de philosophie et encore moins de philosophie utopiste), mais néanmoins stimulant pour tenter de saisir ce qui la justifie, ce qui peut l’informer et la fonder. L’exercice est difficile, exige une lecture patiente, transversale de l’œuvre de Colette, mais il apparaît somme toute fécond de mettre en parallèle, sinon deux systèmes de pensée, deux visions du monde qui se croisent parfois, se rencontrent, mais pourtant semblent demeurer si étrangères l’une à l’autre. L’entreprise présentée ici sera modeste, entrevoir ce qui fait se rejoindre ces œuvres comme ce qui les fait s’opposer [2].
La première raison qui fait établir un lien entre Colette et Charles Fourier est d’ordre biographique. Les frères de la mère de Colette, Sido, qui vivaient en Belgique, étaient des esprits libres, indépendants, amateurs de pensée libérale. Mêlés à une vie culturelle et artistique d’avant-garde, on peut faire l’hypothèse que la mère de Colette fut influencée par ce non-conformisme familial qu’elle a pu transmettre. Elle se montra, il est vrai, tolérante avec ses employées de maison, qui se trouvaient affublés de cet outrageant vocable de « filles-mères ». Colette aurait hérité de cette liberté d’esprit, de cette indépendance de mœurs et de comportement : nul n’en doutera car effectivement, Colette ne se priva pas de choix de vie contestés et offrant matière à scandale. Henri Jean-Albert Gauthier-Villars dit Willy, son mari, l’introduisit au début de ce siècle dans le monde de Lesbos, où elle fit la connaissance de femmes revendiquant leur homosexualité : Géorgie Raoul-Duval, Nathalie Clifford-Barney, Lucie Delarue-Marchus, Renée Vivien. Après sa séparation d’avec Willy, elle vécut quelques temps loin de toute convention avec Mathilde de Morny, dite Missy. En 1907, elle fit parler d’elle au Moulin Rouge en échangeant un long baiser avec Missy dans la pantomime « Rêve d’Égypte ».

À la même époque, elle gagna sa vie en faisant du music-hall, ce qui dénotait un non-conformisme assumé. Elle pratiqua d’autre part l’alternat d’amour au sens fouriériste et proclama le bien-fondé de ce choix.
Voyez-vous que le hasard ait fait de moi une de ces femmes cantonnées dans un homme unique, au point qu’elles en portent jusque sous terre, stériles ou non, une ingénuité de vieille fille ? [...] D’imaginer un pareil sort, mon double charnu, tanné de soleil et d’eau, que je vois dans le miroir penché, en tremblerait, s’il pouvait trembler encore d’un péril rétrospectif. [3]


Ces éléments biographiques n’ont d’autre finalité que confirmer que l’auteur Colette fut une femme moderne, si ce qualificatif signifie qu’elle a transgressé les conventions morales, sexuelles ou l’ethos de son milieu, de son temps historique. La preuve est aussi apportée par le fait qu’elle fut l’amante du fils de son second mari Bertrand de Jouvenel : les anthropologues affirmeraient qu’elle a commis un inceste indirect.
Loin des éléments anecdotiques, il paraît plus intéressant de confronter de l’intérieur les deux œuvres : celle de la romancière (avec la difficulté de venir à bout de ses milliers de pages), traversée par une philosophie de l’existence ; celle de Fourier qui, dans le Nouveau Monde amoureux, refonde et repense les liens sociaux, affectifs et amoureux. Ces lectures conjointes éclairent en effet deux conceptions à la fois proches et opposées de l’amour et du plaisir. Il nous a paru totalement inutile, voire illégitime d’établir des parallèles avec la partie plus politique et économique de la pensée de l’Harmonie sociale et industrielle de Fourier, la pensée de Colette étant étrangère à une problématique éthico-politique. À peine entrevoit-on dans les tableaux de vie mondaine et artistique, dans ses romans et nouvelles, quelques-uns des désagréments occasionnés par la guerre. Observatrice de la nature, des sentiments, des relations et de la psychologie humaine, elle n’inscrit pas ses histoires et ses personnages dans une organisation socio-économique historique à l’opposé de Charles Fourier qui apporte une réponse globale et utopique à la misère sociale et économique dont il est le témoin scandalisé. Si Colette a quelque « once de fouriérisme », elle ne peut l’être que par la philosophie de l’amour et du plaisir qu’elle défend. Il y a en effet dans l’œuvre de Colette une méditation continue sur l’amour qui prend aussi la forme d’un chant qui le célèbre, l’amour sortant victorieux de l’entreprise vie : « Loin de ma plume et de ma vie » écrit Colette dans une œuvre de maturité [4], même si elle s’attarde à médire de lui, à le renier. « Je te fais amende honorable, amour contradicteur, victorieux et quelque nom que porte ta floraison dernière ».
Pourtant cet éloge de l’amour est tempéré par la certitude qu’il est une impasse, qu’il fait descendre au fond de toutes les souffrances et douleurs. Dans Le Pur et l’Impur, longue confession et réflexion sur le plaisir qualifié de légitime, Colette décline toutes les difficultés et impossibilités du jeu amoureux : jalousie, violence, suicide, trahison. Il ne peut qu’instiller l’isolement, la solitude. Impasse qui n’arrête pas l’obstination dans la recherche du plaisir et de la volupté.

O plaisir, bélier qui te fêles le front et qui recommences ! C’est peut-être la seule curiosité déplacée, celle qui s’obstine à connaître, en deçà de la mort, ce qu’il y a un peu au-delà de la vie [...] Les consumés des sens ont toujours commencé par s’élancer en grand appareil d’énergumènes dans un gouffre. Mais ils remontent [5].


Le plaisir qui porte au-delà de la vie, à proximité de la mort, prend ici valeur d’expérience limite absolument nécessaire et répétée. On songe aux analyses de l’érotisme par Georges Bataille, expérience qui frôle, qui flirte avec la mort. On descend au fond de la vie jusqu’à approcher la mort. Les « consumés des sens » : ils se jettent dans le plaisir et la volupté sans crainte du danger et ne ressortent pas indemnes. Chez Colette, la carrière du plaisir est triste, enfile son cortège d’insatisfaction et de désillusions même si la sensation, l’émotion, la volupté sont au centre de toute existence ; ce que dit le personnage de « Mitsou » dans le roman qui porte son nom : « on est très sot avec des sens fins et une telle aptitude à éprouver ce qu’on ne raisonne point ».
Il y a ainsi une philosophie du plaisir chez Colette qui définit la vie, la surdétermine. Les consumés des sens portent jusqu’aux dernières limites l’expérience vitale. Les « démons charnels » sont crus, impurs et pourtant si nécessaires, si incontournables, appartenant à la condition humaine. Cette philosophie du plaisir toute ambivalente peut être rattachée à la découverte de Fourier de l’axe majeur de l’amour polymode moteur de base des rapports humains. Les amours en harmonie sont simples, composés, mixtes, exclusifs ou collectifs, multiples et nuancés sur le clavier passionnel. L’amour pour Fourier est ressort de ralliements, de liens sociaux, générosité et reconnaissance d’autrui, fondateur d’une nouvelle socialisation. L’amour sans interdit, sans répression, en libre expansion est créateur de liens, de solidarités, ne désagrège pas mais au contraire contribue au bonheur social, à l’unité. Les amours variées déclinées sur tous les modes, deviennent principe éthico-politique, car elles favorisent une socialité inédite loin de l’égoïsme ou de l’exclusivisme monogamique des formes d’union de la civilisation actuelle. Nous percevons une première différence : les relations d’amour dans l’œuvre de Colette sont sources de tourments, d’échecs multiples. Elles isolent au lieu de rallier et de relier. Elles réalisent l’unité et l’harmonie sociale chez Fourier alors que chez Colette elles restituent les êtres à leur solitude ontologique. Fourier défend cette idée simple, qu’il élargit à un principe éthico-politique : les liens en civilisation sont égoïstes, individualistes, restreints alors qu’en harmonie l’organisation en séries, en phalanstère contribue à les élargir, les développer. En harmonie, l’amitié succède à l’amour antérieur, il ne peut y avoir rupture : amitié pour les amants passés et amours pour les amants présents. « C’est vraiment le côté odieux, honteux des civilisés ; rien de plus odieux que la coutume presque générale d’oublier complètement les personnes qu’ils ont idolâtrées [6] »
Il y a dans ce texte de Fourier, Le Nouveau Monde amoureux, une manière légère, voire bouffonne, comme le suggère Simone Debout dans sa préface, de concevoir les passions. L’amour polymode des polygynes tolère toutes les manies, tous les goûts, multiplie les possibles sans effet négatif, sans surexciter les sentiments de jalousie, de trahison. La passion non engorgée ne produit aucun des maux connus en civilisation. Il y a bien dans cette pensée de la passion une grande légèreté, une inversion de la psychologie en civilisation. L’amour en harmonie supprime tous les échecs, brise tous les liens d’attachement douloureux, dans une conception parfaitement optimiste et harmonieuse des nouvelles relations. La fidélité compose avec l’alternance, l’inconstance : on peut conserver un amour pivotal ou favori à travers, dit Fourier, des « nuages d’inconstance [7] ». On peut, affirme-t-il, lorsque l’on choisit d’être polygyne aimer à la fois sept femmes dans une session de caractères qui dure dix à onze mois et on peut aimer en même temps sept pivotales et une superpivotale ! Il y a quelque chose d’inouï dans cette organisation des amours qui en multipliant les liens concourt à la réussite de l’harmonie, de l’unité individuelle et sociale. Fourier pense l’amour libre mais avec la nécessité de mettre de l’ordre dans les pratiques, les attractions et les goûts en amour qui livrés à eux-mêmes ne trouvent pas leurs débouchés. La mise en scène de la vie passionnelle est exploration de toutes les formes de plaisir les plus fantasmatiques, les plus insolites, les manies sexuelles les plus étranges. Tous les goûts et fantaisies amoureux trouvent place dans le système classé, ordonné des passions. Fourier ne laisse pas les singuliers, les bizarres à leur solitude, à leurs manies mais au contraire les rapproche, constitue des ligues, des sectes de « comanciens » en fonction des plaisirs de chacun. Ainsi paradoxalement ce qui paraît doux délire est rationalisation, mise en ordre méthodique des goûts amoureux. « Les amours dans l’ordre actuel ne marchent qu’au hasard. Il ne règne aucune méthode pour gérer les assortiments gradués de chacun. [8] »
Toutes les passions tolérées en harmonie sont satisfaites sans générer de rivalités, de conflits. Il fait l’hypothèse qu’en désengorgeant les passions, tous « les mauvais sentiments (jalousie, trahison, etc.) qui les entourent n’auront plus de raison d’être. Fourier ne méconnaît-il pas l’essence même de l’âme amoureuse exclusive, possessive, incapable d’alterner ? Pour lui l’inconstance est salutaire, vertueuse mobilisant les désirs de ralliement, d’unité, mais est-elle praticable sans les drames de l’amour ? Chez Colette, l’amour au contraire dépouille, salit, rend faible (elle a beaucoup souffert de l’infidélité de Willy) autant que chez Fourier, il réconcilie et réunit. L’auteur du Nouveau Monde amoureux n’est jamais préoccupé des impossibilités et faillites des relations amoureuses et il lui plaît de penser que si l’on met un peu d’ordre, de classement, chaque passion trouvera son complément et que la satisfaction sera universelle. Dans l’œuvre de Colette, il y a au contraire une impossibilité ontologique, une inconciliabilité entre hommes et femmes. Les amours inconstantes se terminent mal. Les relations se défont dans la rupture de tous les liens et dans l’incompréhension. En harmonie, nulle prévention, nulle suspicion ne freine les amours multiples. L’instabilité est une chance, une qualité morale même puisqu’elle renforce les rapprochements et en cela ne provoque aucune déconvenue ou insatisfaction.
Ce qui permet aussi de faire un parallèle entre Colette et Fourier c’est l’acceptation des « anormaux sexuels [9] », des anomalies de toutes sortes, mais Colette les qualifie de monstres, ce qui la situe aux antipodes de la gamme infinie des comportements sexuels dans le monde amoureux de Fourier, source d’harmonie. Au contraire le spectacle des anormaux sexuels, pédérastes passifs, onanistes morbides, travestis, ne procure chez Colette que désespérance et tristesse. L’extravagance, l’errance sexuelle est ici désespoir et désastre, impossibilité de remonter le gouffre à l’opposé de la légèreté bouffonne des mœurs amoureuses de Fourier.

Je ne recueille à contempler ces petits crimes contre la nature que de la tristesse. C’est triste ces chiffons à dentelles sur des cuisses noires de poils, ces buissons pileux autour d’un sexe informe, ces jarretières de roses rococo sur une rotule caillouteuse...
Et ces pauvres figures de faux hommes, ces anatomies de femmes à mettre au rebut, ces essais avortés de front, de menton, de crâne.
Leur roman est encore plus triste. Car ils ont leur roman, leur espoir, leur désastre. [10]


Triste spectacle donné par la comédie humaine ; crimes contre la nature, dit Colette, cela signifie qu’elle pose une norme de nature, du comportement sexuel là où Fourier fait disparaître toutes limites. On pourrait cependant noter que les manies sexuelles du Nouveau Monde amoureux sont sans morbidité, simples fantaisies : flagellation, manie du gratte-talon, spectacle des amours saphiques. Chez Colette les déviances sexuelles envisagées dans leur rapport à des normes, sont posées sur fond de mensonge, de « faire comme si », de mimiques désespérantes. Le sexe chez Colette peut être une farce triste où les acteurs trichent, se jouent la comédie, se travestissent alors que chez Fourier il est vecteur de vertu, de joies, d’eudémonisme.
Il faut cependant ajouter que chez Colette, il n’y a pas de condamnation morale des comportements sexuels anormaux. Ainsi reconnaît-elle une légitimité à l’homosexualité, l’amour avec son « demi-pareil » : « Il est en moi de reconnaître à la pédérastie une manière de légitimité et d’admettre son caractère éternel. [11] ». Elle raconte dans ce même texte l’existence d’une relation exemplaire de deux femmes anglaises, dans une retraite inviolable.
Colette défend l’androgynie foncière de tout être : mixte incertain de féminité et de masculinité. Les hommes, affirme-t-elle, ne supportent d’ailleurs pas la virilité spirituelle des femmes. Colette n’a cessé de faire la démonstration qu’elle n’avait pas une vision réductrice des rapports, destinées humaines et de la nature humaine. Ce qui prédomine dans son œuvre, c’est que l’amour n’est pas rédempteur toujours allié au plaisir nécessaire mais penchant vers la perte de soi, l’humiliation et la part animale. Cette ambivalence de l’amour n’est jamais déclarée en faveur du salut par l’amour.
Loin de toutes les lectures rapides du Nouveau Monde amoureux, il faut se persuader que Fourier accorde une place majeure à ce qu’il appelle l’amour céladonique ou angélicat en amour - ou l’amour sentimental qu’il oppose à l’amour matériel. L’amour céladonique est digne de soin et de recherche : il le trouve chez Jean-Jacques Rousseau avec Mme de Warens qui n’aurait pas eu besoin d’être satisfait matériellement [12]. Loin de tous les a priori, Le Nouveau Monde amoureux ne prône pas un libertinage sans frein, sans tempérance. Fourier accorde une place majeure à l’honneur dans l’amour et même subordonne l’amour à celui-ci : « Je donne beaucoup de lustre à l’amour spirituel pour en donner beaucoup à l’amour matériel. Mes dispositions ne tendent qu’à les rendre honorables tous deux dans leur développement, rallier le monde social au vœu évident de la nature qui est de contenter tous les goûts. [13] » Ce que Fourier nomme l’épreuve d’amour transcendant témoigne d’une aspiration à la noblesse d’amour qui convient aux âmes fortes et raffinées capables d’établir des liens d’affection indépendants du plaisir [14]. L’amour céladonique fait atteindre une sainteté passionnelle en mineur (la sainteté en majeur est du ressort de la cabale gastronomique !).
Pourtant le système de l’harmonie nécessite la polygynie, l’inconstance, l’alternat jusqu’à l’orgie qui permet de cumuler les liens et les sympathies. Il faut cependant toujours sauver les débordements, les orgies de plaisir, « les mêlées sensuelles » du déshonneur, de l’irrespect. L’expérience de l’amour libère des tromperies, mensonges. L’esprit de la méthode fouriériste, en faisant coexister toutes les nuances de l’amour, l’amour en spirituel et en matériel, lève l’hypothèque de l’amour jaloux, exclusif, destructeur ou menteur. La conversion de l’âme amoureuse à toutes formes de relations amoureuses, angélicat ou polygamie, est réjouissante. L’angélicat en amour est une belle promesse mais tous les êtres, dit Fourier, deviennent polygames quand ils ont pleine liberté [15]. La polygamie est de nature, soutient-il : la preuve ? en civilisation la polygamie est furtive, clandestine sous la forme de l’adultère. Il y a dans Le Nouveau Monde amoureux un réjouissant lexique pour signifier l’hypocrisie de la civilisation qui défend l’amour exclusif, monogamique. Ce n’est là que fourberie, arquelinade, prudoterie, cagoterie, sornette, fraude et contrebande sentimentale sur les passions.
L’amour libéré retrouve valeur honorifique, respectueuse, source de tous les ralliements et non générateur d’antagonisme et de conflits. Il y a bien dans la solution fouriériste refondation de tous les rapports, liens amoureux, renversement des tendances morbides, perverses de la sexualité en civilisation... La méditation de Colette n’est pas sur ce versant du renversement, de la libération, mais du côté de l’ambivalence de l’amour/plaisir. Ainsi Parinaud relève cette remarque de Colette sur l’amour Mes apprentissages.

La volupté m’apparut comme une merveille foudroyante et presque sombre... On dirait que pour lui - et je sens que ceci nous sépare - la volupté est faite de désir, de perversité, de curiosité allègre, d’insistance libertine. Le plaisir lui est joyeux, clément et facile, tandis qu’il me terrasse, n’abîme dans un mystérieux désespoir que je cherche et que je crains.  [16].


L’ambivalence ne pouvait être mieux affirmée par l’écrivain, la volupté étant plus sombre que le plaisir qui cependant terrasse dans sa légèreté même ! Il faut peut-être conclure ce parcours dans deux visions existentielles, par une hypothèse. Fourier nous semble rêver le plaisir, les relations amoureuses, c’est-à-dire les imaginer, les créer de « toutes pièces ». Colette au contraire les dissèque, les analyse dans leur vérité, à la fois exaltante et désespérante. Si l’un rêve le plaisir peut-être sans l’avoir expérimenté, l’autre a fait l’expérience des plaisirs et ne peut s’empêcher de les ramener à la part obscure de l’être. Les rêver, les inventer, c’est leur prêter au contraire tous les possibles, toutes les vertus et dans l’œuvre réformatrice de Fourier, fonder un nouveau monde sur l’amour recréé.